CENTRAFRIQUE NEWS EXPRESS

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Ebola: la mise en garde contre les produits de chasse provoque le désarroi des vendeurs à Bangui

"Depuis que l’on a parlé d’Ebola dans notre pays, on souffre. C’est seulement à travers ce commerce qu’on achète des vêtements pour nous et nos enfants, qu’on paye les loyers ou qu’on se soigne".
 
 
 
 
 
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AA/ Bangui/ Sylvestre Krock

 

 

« Attention !  Les chauves-souris, singes, gorilles, antilopes et rats transmettent le virus d’Ebola » ce sont les SMS diffusés en boucle via les téléphones mobiles ou dans les média par le ministère de la santé publique qui ont changé les habitudes alimentaires et provoqué le désarroi des vendeurs des produits de chasse.

« Même si Ebola n’est pas encore arrivé chez nous, il est néanmoins  prudent de s’abstenir temporairement de consommer de la viande de chasse. Et, c’est ce que je fais avec la famille. »  a déclaré Clarisse Songo, ménagère au quartier SICA II.

 

Par contre, Yolande Passéra au quartier Yassimandji parait alarmiste. « Nous qui n’avons pas le moyen de nous approvisionner dans les supermarchés, comment pourrons nous nous en sortir si l’alimentation devient sélective à cause d’Ebola ? » s’est-elle interrogée. « En attendant, puisque la maladie n’est pas encore déclarée en Centrafrique, nous allons continuer de manger la viande de chasse surtout qu’avec le départ des éleveurs peulhs suite aux tensions intercommunautaires, la viande de bœuf se fait de plus en plus rare et chère » a résolu pour sa part Rosalie Yassibada au quartier Yangato.

Malgré les attitudes, somme toute diversifiées, des consommateurs vis-à-vis de la question, les conséquences immédiates sont d’ores et déjà ressenties sur les marchés. Les produits de chasse trouvent de moins en moins de preneurs. La clientèle se rebiffe. Les « Wali Gara » autrement dit commerçantes de cette denrée naguère très prisée par les Banguissois se plaignent. La mévente est sans précédent.

Pourtant au marché de Pk 12 comme l’atteste la vendeuse Lydie Ramadane , « on trouve toute sorte de viande de brousse, notamment la viande de singe, biche, gazelle, antilope, etc.  La viande de singe est beaucoup plus prisée par nos clients, or on nous dit qu’Ebola se contracte par la consommation de la viande de singe et les chauves-souris. »

Sur ce marché à l’entrée nord de la capitale centrafricaine, pôle par excellence d’approvisionnement en viande de chasse, le déboire de ces vendeuses est palpable.

Lydie Ramadan est vendeuse de viande de chasse au marché de Pk 12, elle fait part de son dépit : « Depuis que l’on a parlé d’Ebola dans notre pays, on souffre. C’est seulement à travers ce commerce qu’on achète des vêtements pour nous et nos enfants, qu’on paye les loyers ou qu’on se soigne. Mais depuis un certain temps, le ministère de santé n’a cessé d’envoyer des SMS sur les téléphones pour interdire la consommation de la viande boucanée, ce qui fait que carrément les gens n’achètent plus la viande de brousse. Une marchandise de 400 ou 500 milles F. Cfa (785 $ ou 981 $) peut nous revenir qu’à 200 ou 250 mille F Cfa. (292 $ ou 490 $) »

Le même son de cloche est enregistré avec Antoinette Moké : « C’est depuis mon jeune âge au temps du président Bokassa que j’ai commencé à vendre la viande boucanée au marché de Pk 12. Mais les informations sur la présence d’Ebola dans le pays ne nous ont pas rendu service. Notre commerce ne tourne qu’à perte. Par exemple, la gazelle qu’on achetait entre temps à 3 000 F  Cfa (5.9) est aujourd’hui à 7 000 (13.7 $) et arrivé sur le marché, on ne peut pas vendre à plus de 5 000 F Cfa (9.8 $). Les clients nous ont tous fui à cause d’Ebola. » a-t-elle raconté.

Dans leur déconvenue, les vendeuses s’inquiètent du sort de leur famille qui dépend étroitement de cette revenue, ainsi que l’alternative possible à la patente d’exploitation dûment payée à l’Etat.

«Nous demandons au ministre du commerce à qui nous payons des patentes de voir avec ses homologues de la Santé et des Eaux et forêts d’aller effectuer des prélèvements sur la viande dans nos forêts, l’examiner et de nous dire exactement quel est l’état actuel de la viande qui sont sur nos marchés ici. Si c’est confirmé qu’elle est infectée, qu’ils nous le disent et qu’on arrête le commerce de viande boucanée au lieu d’investir toujours à perte. » a déclaré Sidonie Bokari.

« Il y a une mauvaise interprétation » a estimé Léon Modomalé, communicateur en matière de santé au ministère de la santé publique face à cette accusation. « Les gens écoutent l’information, mais l’interprètent mal » a-t-il ajouté avant de poursuivre. « Il s’agit d’éviter de manipuler les animaux morts en brousse. Cela nous expose tous, car le chasseur en contact avec le sang de l’animal mort introduit automatiquement la maladie au sein de la communauté. A ce stade du danger, ni les vendeuses ni les consommateurs ni la communauté appelée à assister les victimes ne sont épargnés. C’est un message qui, en principe doit être relayé par tous et non faire l’objet de ce genre de commentaire suicidaire» a-t-il conclu.

Nonobstant une alerte donnée le 3 septembre à Bangui, qui s'est avérée fausse, la RCA, toujours ravagée, par ailleurs, par une guerre civile à dimension politico-religieuse, demeure jusqu'à présent épargnée par la fièvre hémorragique qui a fait près de 2800 morts dans nombre de pays d'Afrique de l'Ouest et la RDC, selon un dernier bilan rendu public, lundi, par l'Organisation mondiale de la Santé (OMS).

 

 



25/09/2014
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