Centrafrique : "Il faut arrêter les sauvages qui ont fait ça!"
REPORTAGE | Le Conseil de sécurité de l'Onu doit voter ce jeudi une résolution autorisant la France à intervenir militairement en Centrafrique. Le pays est plongé dans le chaos depuis le coup d'Etat de mars dernier. Les ex-rebelles s'en prennent à la majorité chrétienne du pays. En réaction, les milices anti-balakas se vengent sur la population musulmane. Reportage dans le centre pédiatrique de Bangui, la capitale, où des enfants victimes de ces attaques sont pris en charge.
Dans la première chambre, une dizaine d'enfants sont alités, couverts de bandages à la tête, aux mains et aux pieds. Ce sont des rescapés de l'attaque menée à Boali, à 80 kilomètres au nord de Bangui, dans la nuit de lundi à mardi.
Des enfants traumatisés
Un papa en larmes nous interpelle. L'homme en djellaba s'appelle Mahmoud. Il est de l'ethnie peule, éleveur et musulman.
"C'est comme si une partie de moi était morte. Les 13 personnes qui ont été tuées sont toutes de ma famille. Ils nous ont tendu un piège en nous surprenant à l'endroit où on va acheter notre manioc. Vous voyez là, c'est ma petite fille de quatre ans avec toutes ces blessures. Ce sont des anti-balakas qui lui ont fait ça. Ils lui ont même coupé trois doigts... Ils ont utilisé des armes artisanales."
Installés sur des lits vétustes, les plus petits crient et réclament leurs parents. Certains sont orphelins depuis lundi. Leur père, leur mère et parfois leur deux parents ont été tués... mais ils ne l'ont pas encore compris. "Les enfants sont traumatisés. Ils sont en train de recevoir des soins intensifs : perfusion, antibiotiques, pansements, etc.", précise l'infirmer major du centre pédiatrique.
"Parce que nous sommes musulmans"
Awa est l'une des plus traumatisées. L'adolescente de 14 ans pleure comme un enfant. Sa grand-mère Mariam lui tient la main. Elle vient de réussir à l'endormir.
"Elle était au bord d'un champ. Elle a vu mourir beaucoup d'adultes et elle a reçu des blessures à la tête et aux jambes avec des machettes. Elle a également reçu deux balles : une dans le bras et une dans le dos. Les hommes qui nous ont attaqués nous ont dit que nous étions musulmans et que nous devions payer pour les meurtres et violences commises par les Seleka contre les chrétiens. C'est de la vengeance. Je me sens en sécurité ici à l'hôpital. Mais mon cœur n'est pas en paix. Je ressens beaucoup de colère. Rendez-vous compte, j'ai perdu ma fille, mon frère et deux neveux."
"Il faut qu'ils soient punis"
Après cette violente attaque, les médecins du centre pédiatrique ont aussi vu arriver un nouveau-né. Boubakar, le papa, se dit bouleversé Il raconte les circonstances de la naissance.
"J'étais partie avec mes bœufs. Ma femme enceinte était à la maison avec ses parents. Les hommes armés sont arrivés, ont tué les parents et ont tiré une balle dans la jambe de ma femme. A cause de cela, elle a accouché précocement. Grâce à dieu et aux médecins, elle est sauvée et l'enfant vit. Je n'ai jamais vécu de telles choses. Ce que j'aimerais c'est que des autorités, des soldats, - pourquoi pas les français qui arrivent - s'occupent d'arrêter les sauvages qui nous ont fait ça. Il faut qu'ils soient punis."
Par Mathilde Lemaire
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