CENTRAFRIQUE NEWS EXPRESS

CENTRAFRIQUE NEWS EXPRESS

FRANCE - CENTRAFRIQUE : RUMEURS ET FANTASMES

FRANCE CENTRAF.jpg

 

 

Par Joseph Akouissonnne

 

 

L’IMPOSSIBLE MISSION

L’intervention française en Centrafrique, dont on disait qu'elle serait bouclée en six mois, s’est transformée en bourbier. La France et la MISCA se sont retrouvées seules, face aux mystères inextricables de la brousse centrafricaine. Malgré ses demandes d’aide, la France a pu constater que l’Union Européenne n'a cessé d'ergoter et d'agir à minima. Comment, désormais, peut-elle s’extirper de l’imbroglio centrafricain ? Jean-Yves Le Drian, ministre français de La Défense, ne sait plus à quel saint se vouer. Dans ce genre d’intervention, il faut bannir les déclarations intempestives, au risque de ridiculiser la France en se déjugeant toutes les semaines.

 

UNE CERTITUDE : PAS DE NETTOYAGE ETHNIQUE EN CENTRAFRIQUE

Que cela plaise ou non aux pythies occidentales et aux afro-pessimistes, il n' ya pas de nettoyage ethnique en Centrafrique. Il est regrettable que Joanne Mariner, conseillère d’Amnesty International pour les situations de crise, ait déclaré, le 12 février 2014, que "les milices anti-balaka mènent des attaques violentes dans le but de procéder au nettoyage ethnique des musulmans en République centrafricaine." I. Depuis quelque temps, la presse française et les autorités politiques en sont réduites à propager des rumeurs fantasmées. Hier, c’était la chimère de la guerre des religions. Aujourd'hui, la sémantique est nouvelle : on parle de nettoyage ethnique. Catherine Samba-Panza la Dame de fer de Bangui, a raison de le marteler : il n'y a pas lieu d'évoquer un nettoyage ethnique. La R.C.A. n’est pas le Rwanda. On n'a pas, d’un côté des Hutus, de l’autre des Tutsis. La population de la Centrafrique constitue un groupe homogène, que des dirigeants politiques prédateurs et oligarques ont précipité dans une nuit terrifiante. Ce ne sont pas les Nzakaras, les Gbayas, les Yakomas, les Gbanziris, les Zandés, les Bandas ou les Mbanguis qui sont entrain de s’affronter. Le chaos provient du ras-le-bol des citoyens, saignés depuis près d’un demi-siècle. En Centrafrique, c'est d'une révolte sociopolitique qu'il faut parler. Les racines du mal sont à chercher dans les mauvaises gouvernances qui se sont succédé. Dans la cupidité de politiciens véreux, chez qui le patriotisme demeure une inconnue. Il faut cesser d’élucubrer sur des guerres confessionnelles. Des nettoyages ethniques. Est-ce que les religions sont des ethnies ? Quand on parle de l’islam, du catholicisme, du protestantisme, on parle de croyances religieuses. En proclamant partout : « Qu’un nettoyage ethnique est en cours. Que les musulmans regagnent le Nord pour faire sécession… » on accrédite l’idée saugrenue que le Centrafrique est au bord de l’éclatement. Il faut que les médias occidentaux perdent la détestable habitude de regarder l’Afrique à travers le prisme déformant du néocolonialisme et du paternalisme. "Sauvagerie...barbarisme...machettes tranchantes...dépeçages..." Les médias occidentaux, à longueur de reportages, apportent les mêmes commentaires jusqu’à épuisement : puisque c’est en Afrique, c’est forcément "barbare et sanglant." En Bosnie ou en Ukraine, les mêmes scènes de violence apparaissent-elles ? Curieusement, les commentaires diffèrent. Car, dans ces pays-là, on tue "en civilisé". Avec "des armes de civilisés". Point de machettes là-bas... Les Centrafricains, foncièrement pacifiques jusqu’à maintenant, sont devenus, pour les médias occidentaux, des sauvages sanguinaires. Au lieu de rechercher les causes du chaos dans le passé et, tout particulièrement, dans les cinquante dernières années, on s’appesantit sur le factuel sanglant.

 

LES CAUSES DE LA TRAGÉDIE

Souvenons-nous : quand Michel Djotodia et sa bande de mercenaires tchadiens, Janjawids et autres Darfouriens, ont envahi le Centrafrique, avec la prétention manifestes d’islamiser le pays, la population a vu en eux des sauveurs. Elle les a applaudis dans les rues de la capitale. Tout comme elle avait applaudi Jean-Bedel Bokassa et les autres présidents prédateurs en leur temps. Ce n’est que quelques décennies plus tard que les Centrafricains se sont rendu compte qu’ils étaient écartés de la table des indécentes agapes. Ce fut une accumulation de souffrances, qui les précipita dans les entrailles de l’enfer. Une personne étranglée par une main cherchera toujours à se débarrasser de celle- ci. La coupe était largement pleine. La résistance des Centrafricains, face aux envahisseurs et aux injustices endurées, ne pouvait malheureusement que se traduire, un jour ou l'autre, par la violence.

 

QUELLE ISSUE ?

Au départ, les ANTIBALAKAS sont des milices d’autodéfense. Des paysans, abandonnés par un pouvoir central impuissant. Suppliciés par des brigands coupeurs de route et des envahisseurs islamistes. Ils ont donc été obligés de se défendre eux-mêmes. Nombreux sont les Centrafricains qui ont alors pensé qu'ils étaient des héros, dressés contre les tentatives du Président tchadien Idriss Déby de faire main basse sur la République Centrafricaine, pour sauver son trône menacé par ses propres rebelles. Les ANTIBALAKAS ont donc été, au départ, des résistants à l'envahisseur. Mais l’issue des révoltes est souvent imprévisible. Logiquement, ayant atteint leur noble but, c'est-à-dire provoquer le départ de Michel Djotodia et de sa bande de mercenaires, les ANTIBALAKAS auraient dû déposer les armes. Tendre la main à leurs frères musulmans. Soutenir le gouvernement de transition. Car, malgré ses imperfections, la Dame de Fer de Bangui et son gouvernement apparaissent comme le dernier recours possible dans un pays menacé dans sa quintessence, son entité. Aujourd'hui, la nébuleuse SELEKA ne représente plus le danger qu'elle a été pendant longtemps à Bangui. Les menaces se sont un peu diffractées. Les souffrances et les morts n'ont pas cessé, mais un gouvernement de transition est en place. Il n’est peut-être pas parfait. Il faut pourtant faire avec. Le soutenir pour arrêter l’effusion de sang. Il faut déposer les armes. Il faut que les ANTIBALAKAS cessent de faire la chasse à leurs frères musulmans et, en même temps, refusent toute manipulation ou récupération des prédateurs politiques. Ils sont, comme les autres, les dignes enfants de la République Centrafricaine. Ils doivent arrêter les violences et se ranger derrière le gouvernement de transition, afin d’œuvrer pour la réconciliation nationale. Si les ANTIBALAKAS veulent le bien de leur pays comme ils le proclament. Ils doivent d’urgence déposer les armes. En retour, le gouvernement de transition doit leur tendre la main, comme il doit le faire, sans exclusive, à toute l’opposition, à tous les citoyens. Un appel solennel doit aussi être adressé à tous les hommes politiques centrafricains. A tous les membres de la société civile. A tous les habitants de la R.C.A. Pour qu’ils mettent en sourdine les messes basses et les calculs égocentriques. Pour qu’ils hissent haut l’oriflamme centrafricaine du consensus et de la fraternité. Tout doit être fait pour que surgisse rapidement en République Centrafricaine la réconciliation tant attendue par son peuple martyr.

 

A. De Kitiki (25 février 2014)



26/02/2014
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 80 autres membres